Charlène : un voyage initiatique personnel et professionnel

Petite, à la question « qu’est-ce que tu veux faire quand tu seras grande ? », Charlène n’avait pas de réponse. Pire, cette question l’angoissait, parce qu’elle la prenait très au sérieux.

« Je ne m’autorisais même pas à faire une hypothèse, ça aurait été trop déterminant. »

Issu d’un milieu ouvrier, elle ne se sentait pas inspirée par les métiers exercés par les personnes qui l’entouraient. Très bonne élève, elle choisit finalement de faire une école d’ingénieurs, parce que « la science et ses mystères » la fascinent. Elle chemine tranquillement sur cette voie, mais en troisième année, elle vit une crise existentielle, et sent son « âme se dessécher ».

« C’est trop sec comme savoir, ça n’hydrate pas mon âme. »

Très rationnelle et alors peu connectée à ses émotions, la bretonne décide d’aller jusqu’au bout de ses études, sans parler de son mal-être à personne.

Hambourg : quête de soi et quête de sens

En dernière année, elle part en Erasmus à Hambourg, où elle se connecte à d’autres types de personnes, qui l’amènent à découvrir la psychologie, la spiritualité, l’art... D’autres horizons commencent alors à s’ouvrir à elle.

Lors de son stage de fin d’études, elle se confronte à l’absurdité des tâches et au manque de sens qui caractérisent parfois les postes dans des grandes entreprises : remplir des dossiers inutiles, le green washing…

Deux jours avant la fin du stage, une très grosse crise d’angoisse l’envoie aux urgences : le message est clair, ce monde-là n’est pas pour elle.

Grâce à une somme d’argent provenant de la vente de la maison de son père, décédé quelques années plus tôt, et parce qu’à Hambourg, elle ne se sent « pas jugée pour ça » (les Allemands commencent tard dans la vie active), la jeune diplômée s’octroie quelques mois d’espace, arpente les rues d’Hambourg en vélo et s’attarde dans les cafés pour lire et écrire.

Elle imagine alors créer un lieu,

« un café où les gens pourraient venir réparer leur vélo, bouquiner et acheter des vêtements de seconde main. »

La tête sur les épaules, elle décide d’apprendre d’abord le métier en travaillant dans un café.

Plus attirée par la cuisine que par le service, elle commence comme plongeuse, puis commis de cuisine.

Après des études « prise de tête », elle découvre un métier « dans le corps », où elle ne voit pas le temps passer, même en travaillant 10h d’affilée. Mais au bout de 3 ans, les angoisses reviennent.

« J’ai compris aujourd’hui que ces angoisses sont un messager de mon âme qui me dit que ce que je vis n’est pas moi. »

Autour d’elle, ses amis s’impliquent dans leurs différentes carrières, alors qu’elle, pas du tout. Dépression profonde. Idées noires. Elle ne se sent « reliée à rien ».

La découverte du Shiatsu

Elle décide alors d’aller se ressourcer quelques semaines dans sa famille en Bretagne, où elle consulte une énergéticienne. Une rencontre qui la bouleverse, la reconnecte à sa lignée et l’initie « aux énergies ».

Peu après, elle tombe par hasard sur un livre parlant de médecine énergétique chinoise. Après seulement quelques pages, c’est une révélation :

« C’est ça que je veux faire ! »

Cette révélation, elle la garde pour elle, comme un trésor, de peur de la perdre en la partageant.

En rentrant à Hambourg, ce que Charlène appelle « une série de synchronicités » amène sur son chemin le massage Shiatsu.

En Allemagne, pour pratiquer la médecine douce, le diplôme de Heilpraktiker, obtenu à l’issu d’une formation de 3 ans, est obligatoire. Charlène décide donc de faire cette formation, en parallèle d’une formation Shiatsu, tout en continuant son travail en cuisine.

Curieuse et culottée, elle finit par postuler ailleurs, comme cuisinière, alors qu’elle n’a pas les qualifications. Dans ce nouveau café, elle travaille avec un autre cuisinier très créatif, qui l’inspire beaucoup. Elle prend tout de suite ses marques et travaille très vite en complète autonomie. Pendant 3 ans, elle y travaille 10h par jour, 3 jours par semaine, elle adore, et les clients aussi.

Lorsqu’elle ne se sent plus autorisée à exprimer son côté créatif en cuisine, elle quitte son travail.

Durant quelques mois, elle voyage et travaille sur des projets artistiques, avant de décider de rentrer en France.

« Je suis partie 10 jours sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, ça a été une révélation mystique ! C’était très très fort, et quand je suis revenue, j’ai pris la décision de revenir en France. »

Reconnexion aux racines et désillusion

Après 7 ans en Allemagne, l’ingénieure était devenue cuisinière aguerrie et praticienne Shiatsu, avec une richesse d’expériences spirituelles, amicales et artistiques.

« J’ai senti que je pouvais revenir en Bretagne et partager ce que j’avais vécu là-bas. »

À son retour en Bretagne, une phase de doute surgit à nouveau.

« À ce moment-là, je ne me sens pas du tout prête à ouvrir un cabinet de Shiatsu, j’avais du mal à respirer, j’étais complétement bloquée au niveau du diaphragme, alors pour moi c’était totalement impossible d’être praticienne Shiatsu, sachant que ça repose sur la circulation de l’énergie et la respiration, je savais qu’il y avait quelque chose à débloquer avant d’ouvrir mon cabinet. »

En cuisine, Charlène ne se sent pas non plus à son aise. Sans CAP, elle a le sentiment que sa cuisine vegan et créative n’a pas sa place dans sa Bretagne natale. Elle fait tout de même une saison dans une cantine, où elle fait les entrées et les desserts.

« Ça a été la descente aux enfers ! Il faisait chaud, on travaillait 50 heures par semaine, il n’y avait pas de place pour la créativité. »

Blagues sexistes, ragots, hiérarchie forte : Charlène ne se sent pas à sa place.

« J’ai perdu 5 kilos, mais au moins, j’ai bien gagné et ça m’a permis d’ouvrir des droits au chômage. À ce moment-là, je me dis : la restauration, c’est fini, il faut que je monte mon entreprise. »

EnVie d’InSpir : le bien-être au travail

Cette période compliquée et son expérience en Allemagne amène Charlène à créer enVie d’inSpir, qui avait pour but d’amener le bien-être au travail via des ateliers. Pour cela, elle se fait accompagner par une coopérative d’activité et d’emploi (CAE) pendant 12 mois et décroche sa première « vraie » mission en entreprise, où elle anime une demi-journée de cohésion d’équipe.

« Je me suis sentie complétement à l’aise à faire ça, mais je n’avais plus d’argent et je ne me voyais pas faire ça tout le temps, animer ces ateliers à la chaine pour dégager un chiffre d’affaires suffisant. »

Au même moment, son petit-ami de l’époque lui propose de faire une retraite spirituelle. Une pause de 10 jours qu’elle a du mal à s’octroyer, car elle vient seulement de commencer son activité.

« Au départ je me dis, je viens de créer mon entreprise, je ne vais pas partir 10 jours pour mon plaisir ! Finalement, je me l’autorise parce que je trouve une business retreat, donc c’était des gens du monde du travail qui venaient justement pour faire une retraite de pleine conscience. »

Quelque temps plus tard, le petit-ami de Charlène lui propose une autre retraite, mais cette fois-ci de 3 mois. Pour elle, c’est inconcevable : elle vient de créer son activité, elle ne peut pas partir 3 mois !

« Mon destin m’a rattrapée, je fais un ulcère de l’œil, parce que j’étais en surmenage, je me prenais pour l’entrepreneuse super dynamique, je me mettais plein de rendez-vous, j’avais plein de choses à faire… ça a été clair, je suis en train de ne pas m’autoriser à aller à une retraite, alors que clairement j’avais trop de stress, je n’arrivais pas à le gérer. Suite à ça je dis à mon copain, ok on y va ! »

Confinée au monastère

À la suite des 3 mois de retraite des pluies au village des Pruniers, fondé par le Maître Zen Thich Nhat Hanh, Charlène et son petit-ami font le choix de rester pour le programme de volontaire à l’année.

« J’avais 31 ans, m’autoriser encore une année sabbatique, alors que j’avais déjà pris beaucoup de temps, c’était pas rien, mais là-bas, j’étais dans un espace hors-temps. Les moines se sont retirés de la société, donc ils ont le temps. »

Ce confinement choisi, au vert, dans un espace de 20 hectares, arrive à point nommé puisque l’épidémie de Covid-19 débarque en France.

« Le monde était à l’arrêt complet, et nous, on était dans ce monastère, en autarcie, avec une centaine de moines et 30 laïcs. Ça m’a permis d’accepter cette bulle hors-temps et surtout je me suis dit, mais qu’est-ce que j’aurais fait si je n’étais pas venue, mon business aurait été à l’arrêt. On était dans notre caravane, au vert, on avait 20 hectares… Je crois que j’étais dans l’un des meilleurs endroits du monde pour vivre cette période. Comme quoi, en n’écoutant pas les peurs, en n’écoutant pas la raison, et en écoutant son corps, on est récompensé de nos choix, même audacieux. »

Sans mauvaise conscience, Charlène prend le temps. Sa respiration se débloque. Au village des Pruniers, elle plante des fleurs, passe le balai, nettoie ; elle fait « la fée du logis », en pleine conscience, et elle apprend la bienveillance envers les erreurs, les siennes et celles des autres, et l’auto-dérision.

« Je me suis donné comme mantra ‘auto-dérision, auto-guérison’. »

Alors qu’elle aurait dû rester dans cette bulle jusqu’en décembre, elle sent qu’en restant trop longtemps, elle n’arrivera plus à revenir dans le monde « concret ».

« J’ai pris du recul, mais là c’est bon, faut y aller. »

Marseille : l’affirmation de soi

Elle repart 3 semaines sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle.

Une transition importante pour elle : elle reprend la route, se remet en mouvement, mais toujours dans un espace hors-temps.

Après ce pèlerinage, elle pose ses valises à Marseille, une ville où elle n’était pas censée rester, mais qui lui inspire l’envie de s’y arrêter un peu.  

Arrive alors le moment du bilan.

« Je veux retourner dans le monde. Je n’ai plus d’argent, il faut que je trouve un travail : je me demande, quelles sont mes qualités ? À ce moment-là, il n’y a pas Shiatsu qui sort, pas la cuisine non plus, il y a écriture, danse, exprimer qui je suis, mais aussi l’idée de transmettre des connaissances. »

La voie, ou voix, à suivre n’est alors pas claire pour Charlène et le besoin d’argent vient « mettre un couvercle » sur ses envies de création. Elle se met à postuler à des offres d’emploi dans des start-up, dans des associations, autour de projets collectifs, mais rien ne prend.

Alors au RSA, elle vit sa situation comme un échec et se remet beaucoup en question : le monde du travail est-il pour elle ? En est-elle capable ?

Un jour, alors qu’elle s’en va déposer un CV, elle croise Julie, une entrepreneuse qu’elle avait rencontrée quelques jours plus tôt. Elle fait des massages et de la cuisine ayurvédique. Elle lui parle d’un projet de restaurant éphémère dans lequel elle va cuisiner pendant une semaine, avant qu’un autre chef ne prenne sa place.

« Et là j’ai vu quelqu’un qui suit ses rêves, alors que moi, j’avais abandonné. Mon instinct a été de lui demander si elle avait besoin d’aide. Et elle a tout de suite dit oui ! »

Cette opportunité remet Charlène dans la joie de cuisiner. La propriétaire des lieux lui propose de prendre le relais la semaine suivante en tant que cheffe.

« J’étais terrorisée, ça faisait longtemps que je n’avais pas cuisiné pour des gens, et jamais à Marseille. Toutes les peurs m’ont traversées, mais j’ai senti qu’il fallait dire oui. Ce qui était beau, c’est que cette fille faisait de la cuisine et des massages, la propriétaire des lieux faisait de la cuisine et des soins énergétiques, et moi je n’arrivais pas à relier Shiatsu et cuisine, je n’arrivais pas à marier ces deux disciplines. »

Une expérience dont elle tire un enseignement précieux :

« Tant qu’on est dans l’imagination, dans la projection, toutes les peurs arrivent, mais une fois qu’on rentre dans l’action, on sait exactement ce qu’on doit faire. Dans l’action, on se rend compte qu’on est plein de ressources. »

Pour Charlène, c’est Marseille qui l’a aidée à comprendre cela.

« C’est une ville où on doit apprendre à prendre sa place, à s’affirmer pour ne pas se faire écraser. Je sais que j’y suis arrivée pour vivre ça. J’ai eu besoin d’aller en Allemagne pour me nourrir du perfectionnisme, et je suis arrivée à Marseille pour vivre autre chose. »

Et maintenant ?

Grâce à toutes ses expériences et nourrie par l’affirmation marseillaise, Charlène a ouvert, en 2022, son cabinet de Shiatsu.

En parallèle, elle continue à faire profiter les autres de sa cuisine végétarienne, originale, saine et colorée lors de retraites bien-être et événements ponctuels, et développe une troisième activité de home organiser. Le home organising, popularisé par Marie Kondo, est l’art de désencombrer, ranger et réagencer l’espace de vie afin de s’y sentir bien.

À travers ces 3 activités, la mission de Charlène avec enVie d’inSpir est de faire circuler l’énergie de vie dans le corps et dans la maison.

Sereine, son assise professionnelle lui permet aussi de s’autoriser à retirer le couvercle posé sur ses projets artistiques.

En janvier 2023, elle crée enVie de poéSie pour exprimer son « côté fou, bohème, esprit libre », qu’elle s’autorise moins à exprimer dans sa vie professionnelle, qui repose sur des activités « sérieuses et silencieuses ». Avec enVie de poéSie, elle facilite depuis quelques mois, un projet de danse en collectif : l’alchimie des polarités.

 

Le message de Charlène aux lecteurs d’Orenda

« Si vous êtes à la recherche de votre voie, apprenez à écouter votre voix, accueillez-la quand vous avez l’impression qu’elle ne se manifeste pas, elle n’est inaudible que lorsqu’on ne l’écoute pas. Si vous n’entendez rien, regardez autour de vous. Demandez-vous ce qui vous fait vous sentir bien, ce qui vous inspire. Plus on laisse de l’espace à cette voix, plus elle nous guide. »

Les livres “déclic” de Charlène

📚 Jung, un voyage vers soi, de Frédéric Lenoir : pour un accès facile aux concepts jungiens, et notamment le processus d’individuation.

📚 La prophétie des Andes, de James Redfield : parce qu’il nous explique comment on peut repérer les signes qui vont nous mettre sur le bon chemin.

📚 Femmes qui courent avec les loups - Histoires et mythes de l'archétype de la femme sauvage de Clarissa Pinkola Estés : parce qu’il dépeint au début des femmes un peu éteintes, soumises, qui n’osent pas être puissantes, et par le biais de contes, montre des femmes qui révèlent leur nature sauvage, puissante. Une puissance de vie qui peut faire peur.

Pour en savoir plus sur les prestations de Charlène et prendre contact avec elle 👉 enviedinspir.com

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Antonia : de l’agro à la psycho